Simplication

des procédures, des formulaires, des objets et des concepts

un fait, des interprétations

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6/6 11h11 Université Libre du Larzac

Comment diminuer le nombre d'interprétations quand on énonce un fait. 

Celui qui parle génère chez son auditoire de nombreuses interprétations (et elles n'étaient pas toutes le but de l'émetteur). Faut-il être très précis ? anticiper les réactions ?... 

La conclusion du débat portera sur cet effort de réduction des interprétations. 

 


 

Si d'un seul et même fait se tirent de multiples interprétations toutes différentes, quelle valeur attribuer au premier et comment endiguer le flot des secondes ? 

"Il fait frisquet ce matin" . "Ah non ! Ça s'est radouci". Deux interprétations de la même température. J'ai froid est un ressenti personnel et 12 degrés paraît neutre mais c'est aussi une convention. 

D'autres exemples se trouvent dans le droit, les sciences ou l'histoire. 

 Par quel mécanisme un fait se transforme en  une interprétation ? 

La multiplicité d'interprétations apporte la sagesse par la diversité mais représente aussi un risque qui enfle aujourd'hui. 

 L'anticipation, une formulation prudente, la précision du contexte (voire le bourrage de crâne) pourraient endiguer le flot d'interprétations. 

Classé dans : théorie Mots clés : aucun

22 commentaires

#1  - Charles a dit :

Tout fait est effet donc fait, produit, résultat donné et non imposé.
L'interprétation pré-suppose une conscience donneuse de sens (rapport à ... distance de ...).
La valeur relève du jugement moral ; ce qui doit être et non ce qui est.

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#2  - Louis a dit :

Quant au débat, en dehors d'aller chercher la solution chez les dictateurs ou encore dans divers dogmes religieux, je ne vois guère quoi faire...
Il y a bien le domaines des mathématiques où l'on peut aboutir à des démonstrations irréfutables, mais dans des univers convenus définis par des axiomatiques. Le monde réel est trop divers, mouvant, irréductible dans sa complexité à un ensemble fini et figé d'axiomes, sauf chez Poutine et Xin Ping !

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#3  - TheConversation a dit :

[Managers, et si vous arrêtiez de dire des choses qui ne servent à rien ?](https://theconversation.com/managers-et-si-vous-arretiez-de-dire-des-choses-qui-ne-servent-a-rien-202866?utm_medium=email&utm_campaign=La%20lettre%20du%20week-end%20de%20The%20Conversation%20France%20-%202612526288&utm_content=La%20lettre%20du%20week-end%20de%20The%20Conversation%20France%20-%202612526288+CID_083b942e2d6fa8103baeb47e88ff7334&utm_source=campaign_monitor_fr&utm_term=Managers%20et%20si%20vous%20arrtiez%20de%20dire%20des%20choses%20qui%20ne%20servent%20%20rien)

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#4  - Bernard a dit :

Un fait est une chose réelle, que l’on ne peut contredire.

Le ciel est bleu. Il ne pleut pas. Ce sont des faits.
Il fait beau ou il fait mauvais, ce sont des interprétations.
Par les temps de sècheresse qui sont les nôtres actuellement, nous pourrions dire il fait beau ou il ne fait pas mauvais les jours de pluie.

Plus polémique ;
Macron gouverne. C’est un fait.
Macron fait une politique de gauche, c’est une interprétation.
Une personne peut justifier son interprétation. Dans le cas ci-dessus, par la redistribution, la protection des défavorisés ou par le taux des dépenses publiques.
On peut aussi interpréter à l’opposé. Macron fait une politique de droite. Il favorise la réussite individuelle, les riches, la sécurité et mené une politique stricte sur l’immigration.
Pour simplifier.

Un fait est objectif. On constate et rien n’y est opposable.

Une interprétation est subjective. Elle de dépend de la personne, de l’environnement et peut entrainer un débat, entre des personnes si l’interprétation est différente.

Dans un système dans lequel on est libre (comme le notre), on ne peut pas et on ne doit pas « endiguer le flot des interpretations ». D’où le débat.

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#5  - Marielle a dit :

D’abord, rappelons qu’énoncer un fait est déjà une interprétation. Car c’est choisir certains éléments du réel comme signifiants.
De même, considérer certains éléments du réel comme non signifiants est aussi une interprétation. Par exemple, ignorer qu’un bateau disparait de la vue lorsqu’il est loin sur la mer permet de se conforter dans l’idée que la terre est plate.

La bataille des interprétations commence par la bataille des faits, chacun pouvant avoir tendance a retenir les faits qui l’arrange.

Donc, un premier outil, l’ECOUTE, pour partager ses faits avec ceux des autres et élargir son expérience du réel. Mais, attention !, il faut se méfier du biais d’auto-confirmation : j’écoute ceux qui voient la même chose que moi. Donc, à bas les algorithmes des moteurs de recherche !

Cela amène à deux autres outils :
Le DOUTE, avoir toujours à l’esprit qu’une interprétation est relative,
Et la COMPLEXITE, la multiplication des interprétations est un empilement de vues partielles et partiales qu’il faut s’efforce d’articuler.
L’ECOUTE, le DOUTE et la COMPLEXITE, amènent au CONSENSUS. Eta nt bien entendu que le CONSENSUS n’est pas l’unité mais un socle commun partagé permettant à des interprétations multiples de cohabiter en bonne intelligence.

Deux engrais pour le bourgeonnement anarchique des interprétations, sont le biais de généralisation (mon concierge portugais est marrant, donc les portugais sont gais) et la myopie conjoncturelle (ce qui arrive est forcément extraordinaire, inédit, sans comparaison).

C’est pourquoi je ne résiste pas à déclarer mon affection pour les vertus des STATISITIQUES et de l’HISTOIRE. Situer les choses dans une perspective plus large, peut mettre en lumière la vacuité e certaines divergences.

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#6  - Christian a dit :

Vu hier au musée juif à Paris cette inscription de Pierre Dac:
« Quand on dit qu’une salle est à moitié vide, cela signifie en même temp qu’elle est à moitié pleine »

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#7  - madeleine sarrouy a dit :

Au regard des commentaires, j'interprète que je suis invitée à dialoguer avec un groupe d'érudits. La rencontre réelle sera donc entachée de cette interprétation et donc déviée de la réalité.
Il se trouve que toute mon activité a été et est encore guidée par les interprétations. Il n'y a pas de création sans interprétation. Le fait traverse les strates de mon histoire, de ma sensibilité et de mon actualité et se transforme pour faire œuvre. Je suis une adepte de l'interprétation qui ouvre un dialogue et insuffle une dynamique de vie.

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#8  - Armand a dit :

Pour le fond, rien à dire. En effet, que ce soit par l’effet du progrès (imprimerie ou internet), ou par l’effet de la démocratie, chacun peut et veut parler de tout, y compris lorsque le manque de compétence devrait inviter à la prudence. On n’y peut rien et c’est bien comme ça. L’alternative consistant à instaurer une censure sur les opinions, est devenue incompatible avec le degré élevé de liberté que nous partageons, du moins dans les sociétés libérales.

Pour ne pas sembler défaitiste, je propose quand même une piste de réflexion : au lieu de consacrer une énergie folle au développement de l’intelligence « artificielle », on devrait réhabiliter l’intelligence « naturelle » dans le système éducatif et dès le plus jeune âge. Ainsi, grâce à un cerveau bien fait, on n’aurait pas à « endiguer un flot… » mais à « prendre connaissance que quelques avis intéressants » sur un fait qui semblait a priori simple. Beaucoup de choses et de concepts ont plusieurs facettes et il est raisonnable que les citoyens de la cité puissent les proposer et/ou, prendre connaissance des avis des autres.

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#9  - Claude a dit :

J'interprète dans le cas présent le mot endiguer.
Endiguer c'est contraindre.
Concernant une interprétation c'est porter un jugement de valeur sur la capacité de celui qui s'exprime à être pertinent par rapport à l'interprétation que l'on en fait soit même.
Présomptueux et pas très bien veillant !
C'est une atteinte à la libre expression !

Le 49,3 est la formule constitutionnelle qui permet légalement " d'endiguer, de museler...", de mettre fin à toute interprétation différente de celle qu'exprime un gouvernement minoritaire à l'Assemblée.
C'est une manière efficace de simplifier la discussion ( plus d'interprétation).

Doit-on vouloir tout simplifier ?

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#10  - Hubert a dit :

La différence de température entre la période glaciaire et celle actuelle est d'environ 5 degrés Celsius de moyenne sur terre de plus.
Avec une augmentation minimale de 2 degrés Celsius, on peut s'attendre à des conséquences telles qu'un départ plus précoce à la plage ou une réduction d'environ 30% des récoltes mondiales. L'être humain est un animal qui a tendance à se concentrer sur ce qui l'entoure immédiatement.

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#11  - Guy a dit :

Relater un fait est un phénomène permanent et il est vrai que les façons de le relater sont parfois nombreuses et opposées.

S'il s'agit de donner son sentiment sur la température de l'air, ces différences de jugement n'ont pas une grande importance. Mais s'il s'agit de donner son sentiment, par exemple, sur la manière dont une personne en a molesté une autre, la description de cet acte doit être la plus précise possible.

Cependant, et afin de défendre une personne accusée de brutalité envers une autre, des personnes appelées avocat ont pour travail de minimiser le degré de violence de leur client ou de lui trouver des circonstances atténuantes.

Il est évident que deux avocats adverses présenteront leur interprétation des faits sous un angle opposé et personne n'y trouve à redire.

- Je crois que toute narration d'un fait est toujours une interprétation, que ce processus est inévitable, automatique, et qu'il répond, consciemment ou non, au principe de survie.

- Je crois qu'il est bon de connaître les différents récits d'un fait afin de s'en faire la plus juste opinion et, lorsqu'on est convaincu de sa véracité, de la soutenir.

- Je ne crois pas qu'on puisse endiguer le flot des interprétations.

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#12  - John a dit :

Pour moi l'exemple est mal choisi. La température est un ressenti, une appréciation et non une interprétation.
Pour qu'il y ait matière à interprétation il faut que deux logiques s'affrontent. Mon système de pensée différent du tien me conduit à une réflexion autre. Lequel est une interprétation ?

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#13  - Françoise a dit :

Le flot d'interprétation est le barrage à la pensée unique... Il ouvre le débat. Il interroge la pensée individuelle, il explore d'autres horizons.

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#14  - Claude R a dit :

UN FAIT/DES OPINIONS
Les interprétations sont au centre
d'une chaîne d’information qui va des faits aux opinions (croyances
et convictions d'un individu ou d’un groupe social en matière
religieuse, philosophique ou politique).
Je choisis donc le biais de l’information concernant les faits et leurs
interprétations.
Tout d abord, on peut s’interroger sur la notion de « fait « : ce fait
est il vrai, vérifié et prouvé ? Quels sont les critères et la qualité de
leur évaluation (ex : statistiques plus ou moins biaisées, images
fausses créés de manière artificielle, etc …).
S'agit-il d’un témoignage direct (j’ai vu, j’ai entendu…) ou d’un
compte rendu sur un support d’information assorti d’une
interprétation (j’en conclus que….) ?
Les interprétations visent notamment à expliquer un fait ou un texte
pour lui donner un sens en reliant les éléments entre eux. Les
questions qui se posent concernent notamment la qualité et la
crédibilité des différentes sources d information (individuelles ou
collectives : par exemple qui les finance, y- a-t-il un conflit
d’intérêt ?)
On le voit, les faits comme leurs interprétations sont extrêmement
variés et peuvent être détournés à tout moment, que ce soit à titre
individuel ou collectif.
Dans ce contexte, comment répondre à ce paradoxe : un fait,
plusieurs interprétations ?
Après avoir vérifié l'objectivité des faits, la diversité des
interprétations est inévitable et semble positive comme expression
de la diversité humaine et de la démocratie (pas de voix unique, de
propagande, etc…).
Il semble également intéressant que les interprétations individuelles
puissent être confrontées et débattues collectivement de manière
claire et avec une grande ouverture d'esprit pour accepter les points
de vues des autres ….et au moins se mettre d’accord sur deux thèses
opposées : « pour" et « contre" le fait débattu avec quelques nuances
pour ces deux pôles.
(pour les informations : consulter une pluralité de sources en les
classant en deux points opposés et leurs nuances…et après
vérification et suivi dans le temps des faits…se faire sa propre
opinion avant de la confronter à celle des autres. Autrefois les grands journaux affichaient clairement leur point de vue politique ou social :
celà facilitait la réflexion individuelle sur les faits et les
informations).
En revenant aux règles de la simplification (par rapport aux faits
transmis et interprétés via des informations directes ou indirectes)
ces propositions me semblent confortées par 4 règles que
j’associerais deux à deux :
- 1.1/Forme ou créer un modèle (pour/contre),
- 1.2/Globalité ou ne pas additionner les détails (débat
contradictoire divisé en 2 points de vues opposés )
- 2.1/ Hétérogénéité ou privilégier la variété (plusieurs opinions
regroupées autour de 2 pôles opposés)
- 2.2/ Insigne ou valider une synthèse en 7 points maximum
(sous-classement des points de vues en 7 nuances maximum
pour chacun des 2 pôles).

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#15  - Jean Claude a dit :

La sagesse du peuple Toltèque nous incite fortement à ne jamais faire de suppositions (3° accord toltèque). La distance est faible entre supposition et interprétation, dans tous les cas la divagation de l’esprit peut conduire à des situations désastreuses.


Nous allons essayer de ne pas tomber dans le piège et d’essayer d’analyser « un fait : de son interprétation à l’action », en suivant le canevas ci-contre.

L’interprétation est inéluctable, mais le plus souvent fausse
L’interprétation est consubstantielle à l’humain
Il est naturel et quasi instinctif d’interpréter les faits, il est donc quasi impossible de se garder de toute interprétation qui est comme une seconde nature.

Exemple : J’ai rencontré un ragondin hémophile – interprétation spontanée, tous les ragondins sont hémophiles (ce qui est faux).

L’interprétation est souvent unique et péremptoire
Nous sommes si imprégnés du bien fondé de notre déduction, que nous nous arrêtons à la première interprétation. Un petit effort de concentration ou de réflexion nous conduirait pourtant à des interprétations beaucoup plus riches. Il faut donc passer de l’interprétation à des interprétations.

Exemple : j’ai vu Marcel avec l’Humanité sous le bras - Interprétation : marcel est communiste. (Un peu hâtif peut-être).

L’interprétation dépend de celui qui la porte
Le même individu/organisation, ne fera deux fois pas la même interprétation d’un même fait. L’environnement, l’humeur, le climat, l’état psychologique, nos dernières expériences ou nos intérêts sont autant de facteurs qui peuvent avoir une influence sur nos interprétations.

Exemple : la terre se réchauffe ; Interprétation : 1- à cause de l’activité humaine 2- parce que l’orbite de la terre se rapproche du soleil

Toute interprétation porte en elle les germes de grands dangers
Nos interprétations conditionnent nos prises de position. Or, les chances sont grandes que les interprétations conduisent à des conclusions erronées, naturellement ou volontairement. C’est ainsi que les fake news naissent et prospèrent. La politique est truffée de ces interprétations : le même fait d’arme en Ukraine est interprété différemment par les 2 parties en présence. Les comportements humains font fréquemment l’objet de mauvaises interprétations.
Grâce aux moyens actuels de communication, les informations circulent vite et surtout sans contrôle, laissant ainsi le champ libre à la désinformation, à la bêtise.

Exemple : « tu es gros donc tu es bête ».
Le harcèlement, le racisme… puisent leurs racines dans ces interprétations toutes faites.

Il faut donc se garder de toute interprétation hâtive, en s’imposant de réfléchir, de prendre du recul et d’analyser ces interprétations la tête froide, c’est-à-dire passer des interprétations hasardeuses aux hypothèses étayées.

Des interprétations hasardeuses aux hypothèses étayées
Tous les outils d’aide à la décision peuvent aider à étayer les interprétations pour leur attribuer des degrés de crédibilité ou de vraisemblance. Plusieurs méthodes s’offrent à nous

La pondération de critères
C’est, comme le bulletin scolaire : choisir des critères significatifs de la pertinence de l’interprétation (les matières), leur attribuer un coefficient en fonction de leur importance relative, enfin noter et faire le total.

Exemple : ci-contre, une analyse pour choisir entre des orientations possibles.

Le recueil de faisceaux, d’indices ou de témoignages
Tel Sherlock Holmes qui n’a pas de preuves, à défaut, il faut rechercher les indices ou recueillir des témoignages qui permettent de passer de l’incertitude à une quasi-certitude nécessaire pour crédibiliser l’interprétation.

Exemple : l’affaire douloureuse du petit Grégory

L’écoute des signaux faibles*
Méthode très utilisée par les services de renseignement ; capter puis recouper les signaux faibles donne d’excellents résultats.

Exemple : en Chine, les embouteillages des centres d’incinération vus par satellites ont permis de mettre en lumière les chiffres erronés des victimes de la COVID

Les SIGNAUX FAIBLES sont les éléments de perception de l’environnement, opportunités ou menaces, qui doivent faire l’objet d’une écoute anticipative, appelée veille (source wikipedia)
Des hypothèses étayées à l’analyse structurée
Écarter le bon grain de l’ivraie
Il faut tout d’abord éliminer les hypothèses peu vraisemblables, voire farfelues en se basant sur les résultats de la phase précédente. Cette opération est beaucoup moins simple qu’il n’y paraît. En effet, quel que soit le soin apporté aux phases précédentes, une erreur est toujours possible qui, à ce stade, peuvent conduire à éliminer à tort certaines interprétations.

Classer par thèmes
Il n’est pas pertinent de comparer des interprétations trop dissemblables. Il sera judicieux de grouper les interprétations retenues par sujet (technique, santé, finance…) à partir desquelles il sera plus aisé de construire une action pertinente.

Prioriser les hypothèses
Il convient enfin de classer chaque interprétation selon leur niveau de probabilité, dans chaque thème.
Vous pouvez être assuré que dans bien des cas, vous aurez faux, mais au moins, vous y verrez plus clair.


En conclusion, la prudence est de mise dans toute interprétation, qui, pour être retenue comme vraisemblable, doit être analysée finement. Telle une enquête de police au cours de laquelle rien n’est acquis qui ne soit prouvé ou, au pire, hautement probable.
Le jugement arrive ensuite, mais c’est une autre histoire.

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#16  - Eric a dit :

« Dire quelque chose de quelque chose c’est, au sens complet et fort du mot, interpréter », nous dit le philosophe Paul Ricœur ( De l’interprétation , essai sur Freud, Le Seuil 1965).
Si, en effet, le mot interprétation renvoie d’abord à la musique, au théâtre, à l’opéra… il est présent partout, dans notre appréhension du monde dans lequel nous vivons, dans les faits qui nous sont rapportés ou ceux auxquels nous sommes confrontés ; le diagnostic du médecin ; la philosophie interprète….. le travail de l’historien, les décisions des juges, ont à voir avec l’interprétation, deux champs de réflexion, ici, présentés sommairement.
L’historien interprète nécessairement, mais dans un cadre déontologique et méthodologique.
Sur le plan déontologique, il soumet ses sources à la critique. Sont-elles fiables ? « Avec de l’encre, n’importe qui peut écrire n’importe quoi », s’écriait au XI ème siècle un hobereau lorrain, en procès contre des moines qui s’armaient contre lui de preuves documentaires. Il faut attendre 1681, l’année de la publication du De re diplomatica pour que la critique des documents d’archives soit définitivement fondée. Mais, durant longtemps encore, les techniques de la critique n’ont été pratiquées que par une poignée d’érudits, d’exégètes et de curieux, avant qu’au XIXème siècle l’historien ne soit ramené « à l’établi » comme le grand historien Marc Bloch le développe (Apologie pour l’histoire, Armand Colin 1974, 7ème édition). On passe de l’historiographie au travail scrupuleux, méthodique, de la recherche historique : une affirmation doit pouvoir être vérifiée, la tromperie, l’imposture bannies.
« Louis XIV devint impopulaire parce que les impôts étaient trop lourds ». Cette proposition veut dire que l’historien sait par des documents que les impôts ont bien été la cause de l’impopularité du roi, mais on peut dire qu’il sait seulement que les impôts étaient lourds et que par ailleurs, le roi est devenu impopulaire à la fin de son règne. Il suppose alors ou croit évident que l’explication la plus sûre de cette impopularité est le poids des impôts. Question : la cause de l’impopularité est-telle la fiscalité, les défaites du roi ou d’autres choses encore ? La connaissance d’autres faits indique que l’impôt est une cause vraisemblable du mécontentement mais d’autres pourraient l’être aussi.
On s’en tiendra à cet exemple pour illustrer notre réflexion sur l’interprétation en histoire. Et on ajoutera que les faits, les témoignages vérifiés, n’excluent pas les nuances d’interprétation, en raison notamment, des problématiques et des questions posées par l’historien.
L’interprétation de la loi par le juge
L’article 4 du Code civil reconnaît au moins implicitement au juge le pouvoir d’interpréter la loi, mais il en limite le champ d’action à l’obscurité de la loi. Si tel est le cas, le juge doit en déterminer le sens puisqu’il ne peut prendre prétexte de la défaillance du texte pour refuser de dire le droit, ce qui serait un déni de justice. Sauf que, en réalité, le texte clair sera le texte dont le sens n’est pas discuté, situation rare puisque chaque partie au procès défend son interprétation. L’interprétation de la loi résulte donc de sa nature et elle constitue une nécessité permanente de son application. Au demeurant, les tribunaux n’hésitent d’ailleurs guère à interpréter des dispositions claires lorsque les textes ont vieilli, sont dépassés, inadaptés, contradictoires avec d’autres textes. De plus le recours à des dispositions larges, souples de certains textes (notion de faute, délai raisonnable, intérêt de l’enfant…), laisse une marge de liberté au juge, et donc à son interprétation.
L’interprétation est un acte de volonté par lequel le juge met en évidence plusieurs choix possibles, et il choisit celui qui lui paraît le mieux adapté, affirmant ainsi son pouvoir créateur de la norme. Lorsque l’interprétation est issue de décisions de la Cour de cassation ou du Conseil d’Etat, le sens donné au texte formera la jurisprudence. On ajoutera, et c’est important, essentiel, que cette opération d’interprétation, ne doit pas s’exercer de manière arbitraire, mais en considération de méthodes forgées au fil du temps et destinées à préserver la cohérence de l’ordre juridique.
Et pour revenir à la simplification, est-ce que l’interprétation en général peut tendre à la simplification ? Difficile, sinon impossible dans la plupart des cas. C’est d’abord « l’objet » qui doit être simplifié pour réduire les possibilités d’interprétation dont dispose « le sujet ».

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#17  - Danielle Ferré a dit :

"Vous ne pouvez pas empêcher les gens de mal comprendre ce que vous dites, mais vous, dites le bien", disait autrefois Daniel Le Bon professeur de psychologie et traducteur de Carl R. Rogers.
Je propose cette entrée dans notre sujet.
A mardi.
Danielle

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#18  - Jean-Marie a dit :

Paul Watzlawick, écrit : " De toutes les illusions, la plus périlleuse consiste à penser qu'il n'existe qu'une seule réalité. En fait, ce qui existe, ce sont différentes versions de la réalité, dont certaines peuvent être contradictoires, et qui sont toutes l'effet de la communication et non le reflet de vérités objectives et éternelles. "» La réalité n’est, que la résultante des compromis, détours et aveuglements réciproques, à travers quoi passe l’information : la somme des confusions, désinformations et communications qui surgissent entre êtres parlants.

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#19  - Alain a dit :

"Les faits sont sacrés, mais les commentaires sont libres".
Réduire le nombre et la diversité des interprétations reviendrait à museler la(les) liberté(s) de penser, de commenter et d'exprimer une opinion.
Ce sont les approches multiples et les points de vue différents, voire divergents, qui permettent l'innovation et le progrès.
"Et pourtant, elle tourne" ...

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#20  - Christine a dit :

Les différences d’interprétation du fait:

· le contexte, l’état de la personne au moment où il a constaté ou vécu le fait (calme, stressée…), la personnalité de chacun (âge, éducation, sensibilité, croyances…) qui pèseront sur l’interprétation d’un même fait. L’influence de tous les signaux reçus (amis, famille, écrans, réseaux sociaux…). L’époque, ses conventions sociales, les avancées de la science et de la connaissance qui vont faire évoluer l’interprétation d’un fait.

· L’intention de celui qui interprète un fait, son intérêt, le degré de son pouvoir ou sa puissance. L’interprétation peut être fallacieuse et/ou imposée à dessein.

· le niveau (individuel ou collectif), la hiérarchie des faits et/ou du contexte qui donneront un niveau d’intérêt et d’importance à son interprétation (Interpréter le temps qu’il fait entre copains à l’apéro ou à une réunion du GIEC n’a pas la même importance, les mêmes effets ou conséquences).

Simplifier l'interprétation d'un fait peut être cruciale ( la température moyenne augmente sur notre planète) ou de moindre importance (il fait 12° aujourd'hui) selon sa portée et les conséquences que le fait induit (ex.1: l'humanité est menacée ou pas, ex.2: je mets un pull ou pas).

· On peut peut-être envisager la simplification sous l’angle de l’intérêt collectif (organisation, pays, monde), et sur des faits qui ont un impact significatif dans la vie des gens (climat, égalité H/F ou raciale, guerres, pauvreté…). On investit le champ du politique, de l’influence des pressions sur le politique (économique, scientifique, populaire…) et se pose la question du bénéfice/risque et du comment.

· En démocratie représentative et dans la vie courante la diversité crée la richesse. Principe de liberté, encadrée par la loi pour éviter les dérives et garantir le vivre ensemble (ex: obligation de contrôle de contenu des médias et réseaux sociaux...). Si nécessité de simplifier il y a sans recourir à la loi, on peut utiliser les moyens évoqués à l'occasion du débat sur "interdire". Sur le plan collectif, le vote est sensé dégager un consensus via le choix d’une représentation (délégué de classe, délégué syndical, conseiller, député…). C’est une simplification en soi quand le système fonctionne, même s'il est imparfait. On peut se demander si la simplification obtenue servira vraiment l'intérêt collectif mais c’est un autre débat.

· Le régime dictatorial est une simplification par l’autorité. Dans certains pays/contextes on évoque la dictature « éclairée », qui serait une autorité indispensable, temporaire (franchir un cap) et bienveillante. A ce jour l’histoire nous montre que le risque est majoritairement bien plus élevé que le bénéfice. La tentation est grande de recourir à des méthodes autoritaires même en démocratie (dispositifs de surveillance, lois abusives...). Et peut-être que l'urgence des grands défis d'aujourd'hui (ex: le réchauffement climatique, devenu un fait avéré et admis majoritairement) augmentera ce risque.

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#21  - Mickael a dit :

Je pense que parler "d'un fait" est trop simpliste. Je ne peux pas imaginer "un
fait" unique et autonome. Ils sont toujours enchaînés les uns aux
autres, un flux analogique, continu, une longue série “de faits”, les uns
après les autres dans l'ordre chronologique.

Pour moi, ils sont un flux continu comme la lumière, l'information, les
battements de coeur....

“Un fait” peut être décrit comme un endroit à un moment donné, où nous
isolons et étiquetons subjectivement “un fait”. Par exemple, un
faisceau lumineux divisé par un prisme ou focalisé par une loupe, où et
quand est “le fait” dans ce processus?

“Un fait” est souvent associé au “dernier fait”, par exemple la dernière
paille qui a brisé le dos du chameau ou la goutte qui a fait déborder la
vase. Tous sont les résultats d'une accumulation "d'un fait".

Même si une première interprétation "d'un fait" n'est pas exhaustive, une
interprétation secondaire peut néanmoins être considérée si
l'interprétation indique une compréhension “du fait” . Laisser de côté
les petits détails et les petites différences, est une interprétation
secondaire qui doit être cohérente par rapport à l'interprétation principale.

Il serait peut-être plus approprié de tolérer (voire d'encourager) les
flux secondaires et leur déviation par rapport à l'interprétation
primaire tant que l'essentiel des interprétations secondaires renforce
ou collabore avec l'interprétation principale.

Si les interprétations primaires sont idéologiquement différentes des
interprétations secondaires, c'est peut-être parce que la chaîne "des
faits" est vue différemment par les uns et les autres, je chercherais alors des faits
successifs et je verrais si tout le monde a le même regard sur ces “faits”.

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#22  - Anne a dit :

Allez, une petite chanson de Prévert à tout.e.s les "malgré nous" que nous sommes ...
"Embauché malgré moi dans l'usine à idées
J'ai refusé de pointer
Mobilisé de même dans l'armée des idées
J'ai déserté
Je n'ai jamais compris grand chose
Il n'y a jamais grand chose
Ni petite chose
Il y a autre chose
Autre chose
C'est ce que j'aime
Qui me plait
Et que je fais"
...et que nous allons joyeusement tenter dans notre interprétation chorale du jour?

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